Product Inbox 📬 Focus #8 - Comment construire sa vision produit ? Le REX de 6 top CPO
Par les CPO de BlaBlaCar, Back Market, Partoo, Yousign, Lunii et Garantme
Après avoir lu cette édition, ce serait super que tu prennes 1 minute pour me dire ce que tu en as pensé :)
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Hello 👋, bienvenue dans cette 8ème édition Focus de Product Inbox ! On est désormais 5251 sur cette newsletter. Merci pour ta lecture et ton soutien 💛.
Je m’appelle Timothé et si ce n’est pas déjà fait, tu peux :
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Hello,
J’espère que tout roule pour toi !
Je suis super content de t’envoyer cette nouvelle édition Focus aujourd’hui pour trois raisons :
La dernière édition remonte à juin dernier (déjà…)
C’est le premier Focus co-écrit avec l’aide de ma super core team 💛
Les invités de cette édition sont INCROYABLES 🤯
Depuis longtemps, j’ai envie d’aborder un sujet central dans le développement des boîtes tech : la vision produit.
Tantôt nébuleuse, tantôt bullshit, la vision produit d’une boîte reste un concept mal compris voire évité. Pour autant, il est impossible de créer une boîte tech ambitieuse sans aborder le sujet sérieusement.
Avec la core team, on a voulu créer une édition pour clarifier le rôle et l’importance de la vision produit. On a aussi voulu te donner des billes en demandant à nos invités d’expliquer comment ils ont abordé le sujet dans leurs boîtes respectives.
Pour aborder une thématique aussi sérieuse, on a visé haut.
Je suis vraiment super content d’accueillir le témoignage de 6 CPO, parmi les plus gros parcours de la scène Produit française.
J’ai nommé 🥁 :
Rémi Guyot, Partner chez Thiga (ex. CPO BlaBlaCar)
Amandine Durr, CPO de Back Market (ex. Director ManoMano)
Benoît Terpereau, CPO de Lunii (ex. CPO Ocus, Deezer)
Emile Karam, Cofondateur et CPO de Garantme
Savinien Lucbéreilh, CPO de Partoo
Christopher Parola, CPO de Yousign (ex. CPO Meilleurs Agents)
Je tiens également à remercier ma super core team sans qui je n’aurais pu produire cette édition aussi efficacement : Nathalie, Hassan, Victor et Guillaume 💛
Pour réaliser cette édition, j’ai posé 6 questions à mes invités :
C’est quoi une vision Produit ? A quoi ça sert ?
Comment articuler :
La vision de l’entreprise,
La vision produit,
La stratégie produit,
Les OKRs,
La roadmap ?
Quel processus suivre pour définir la vision produit ?
À quel moment faut-il formaliser la vision produit ?
A quelle fréquence revoir la vision produit ?
Quelles sont les erreurs (ou biais) à éviter ? Et les tips pour réussir ?
Les points principaux à retenir 🧠
Une vision produit c’est avant tout une histoire. C’est ce que sera ton produit dans 3, 5 ou 10 ans.
Cette histoire peut prendre différentes formes : une phrase inspirante, une maquette, une vidéo,...
Il faut définir la vision produit le plus tôt possible, notamment avant la phase d’hyper-croissance d’une entreprise.
Business vision -> product vision -> product strategy -> product roadmap.
La stratégie = notre plan de bataille pour réaliser la vision. La roadmap = les actions qu’on met en place dans le temps.
Tous ces éléments sont construits collectivement, avec les différentes expertises, et les différents niveaux hiérarchiques.
La vision Produit n’est jamais figée. Elle doit évoluer. Et il faut a minima la challenger ~ tous les ans.
Quelques points d’attention lorsqu’on la construit : (1) ne pas être trop perfectionniste ; (2) ne pas forcer le côté inspirationnel ; (3) rester concret et pas trop théorique.
1/ C’est quoi une vision Produit ? A quoi ça sert ?
Rémi Guyot, Thiga
C'est une projection imaginaire du produit dans le futur. Ça sert à :
a) Aligner différentes équipes qui travaillent sur un même produit, sans leur demander d'efforts de communication additionnels,
b) Motiver les personnes susceptibles de contribuer,
c) Alimenter la roadmap d'éléments fondateurs.
Amandine Durr, Back Market
La vision Produit est une histoire que l’on raconte le soir au coin du feu, et que tout le monde adore écouter attentivement. Elle peut aussi se raconter de façon plus pragmatique sur Zoom, ou dans une salle de réunion. Mais le but est le même : embarquer, projeter, inspirer, questionner, faire réfléchir, retenir l’attention et puis au final, aligner. Comme une vraie histoire. Parce que, soyons honnêtes, un plan d’actions ça ne fait pas le même effet. Personne n’est transporté par une roadmap.
Et donc de quoi parle cette histoire ?
Une vision produit raconte comment un objectif business va se traduire dans une stratégie de moyen long terme. Idéalement 18 mois, car c’est suffisamment loin pour se projeter et se montrer ambitieux. Cela donne le temps de mesurer et récolter les fruits de la stratégie. Mais, l’horizon de temps peut aussi être plus court si le produit est encore immature et risque de pivoter beaucoup.
Emile Karam, Garantme
Ce n’est pas ce que l’entreprise propose actuellement, mais les bénéfices qu’on espère pouvoir apporter aux clients dans le futur.
Le mot bénéfice est clé, la “Vision Produit” n’a pas pour rôle de présenter une fonctionnalité en cours de développement et/ou un déploiement proche. Cette mission est confiée au ChangeLog ou la Product Update/Newsletter.
La “Vision Produit” doit remplir 3 missions
Attirer et recruter des talents
Aligner et habiliter les équipes
Créer une voie de discussion avec ses clients
Christopher Parola, Yousign.
Chez OCTO Technology, on créait pour chaque projet Agile que nous accompagnions une Vision Produit : une phrase qui résumait pour qui on réalisait le produit, quelle en était la fonctionnalité clé et quel bénéfice il allait apporter. Depuis mes travaux chez Meilleurs Agents, au sein du groupe Axel Springer et plus récemment chez Yousign, quand on parle de vision produit il s'agit d'une vision plutôt à l'échelle de l'entreprise, qui s'inscrit dans la mission et la stratégie. On s’est concentré sur la seconde définition car j'ai l'impression que c'est à date la plus utilisée, notamment avec la popularité croissante du Product Led Growth. Ça marche aussi bien dans le cas où le produit n'est pas central dans l'entreprise.
Benoît Terpereau, Lunii
Plus précisément c’est l’expression de ce que ton produit sera dans 3 ans (3, 4, 5 il y a plusieurs écoles mais moi j’aime bien 3). Peu importe la forme, chaque personne de ton entreprise doit comprendre et s’approprier ce futur pour s’y préparer.
C’est fondamental car tout découle de ça : La stratégie, les objectifs, la roadmap, etc … pour le Produit, l’Engineering et tous nos stakeholders. Le bénéfice le plus flagrant c’est la priorisation des features. Comment prioriser si tu ne sais pas où tu vas ? Avec une vision claire, une partie de ce fardeau disparaît (au moins en partie).
Là je sais ce que vous vous dites : Ok mais on ne sait toujours pas à quoi ça peut ressembler une Vision… Et bien moi je prône pour une forme la plus tangible et claire possible : Un storyboard, une vidéo, des maquettes, finalement tout ce qui permet de montrer visuellement à quoi va ressembler le futur : Le concept car de votre produit. Si l’automobile y arrive, dans le digital nous n’avons pas d’excuses.
2/ Comment articuler vision d’entreprise, vision produit, stratégie produit, OKRs et roadmap ?
Rémi Guyot, Thiga
- Vision : tentons de rejoindre ce château ennemi au loin
- Stratégie : le territoire étant infesté d'ennemis, nous ne voyagerons que la nuit
- Roadmap : nous allons commencer par atteindre ce bosquet en haut de la colline d'ici demain matin
Bref, la vision, c'est l'horizon ultime que l'on vise. Chacun de ces niveaux doit être matérialisé de manière autonome (c'est-à-dire qu'on doit pouvoir les consommer indépendamment les uns des autres), mais le tout doit être cohérent. Pour vérifier la cohérence, tu demandes "pourquoi ?" en montant d'un niveau, et "comment ?" en descendant d'un niveau. Exemple : pourquoi devons-nous voyager la nuit ? parce que nous souhaitons conquérir un château actuellement en territoire ennemi.
Benoît Terpereau, Lunii
Pour moi la Vision globale de l’entreprise doit décrire l’impact que l’entreprise veut avoir sur son marché, la société, le monde, l’univers, etc.
En revanche, elle ne dit pas comment on y va. La Vision Produit elle va décrire le comment ou plutôt le « avec quoi ». Si on reprend l’analogie du concept car, la vision globale pourrait être de transporter une famille de Lille à Marseille sans émission de CO2 et en toute autonomie. La Vision Produit elle, serait une voiture électrique autonome et super jolie ou ... un train . La Vision Produit découle donc naturellement de la Vision de l’entreprise car elle la sert.
Une fois que la Vision Produit est bien comprise, va en découler la stratégie. « Quel est notre plan de bataille 2023 pour se rapprocher de cette vision fin 2025 ? » La stratégie peut prendre plusieurs formes mais souvent c’est une roadmap annuelle. Soyons honnête on n'aime pas trop cet exercice mais il est parfois nécessaire pour aligner une entreprise entière. Le secret c’est de se donner le plus d’espace dans ce cadre parfois contraint pour garder de l’autonomie. Par exemple, on peut parfaitement mélanger une feature « importante » à délivrer et un objectif à atteindre. D’ailleurs c’est à ce moment là que l’on définit quels objectifs on a envie d’atteindre. Cela peut être sous forme d’OKRs ou mieux une North Star Metric comprise par tout le monde et facile à mesurer.
Amandine Durr, Back Market
Commençons par le travail d’équipe. En vrai, chez Back Market on ne parle pas de vision produit. On parle de vision “Trifecta”. Une Trifecta est l’équipe qui regroupe les fonctions Produit, Engineering et Business autour de chaque pôle fonctionnel. Cette organisation permet d’être tous dans le même bateau, tous impliqués dans le développement du produit et du business, et d’arrêter de se considérer comme des “stakeholders” (quel mot affreux). La vision est donc portée et écrite par la Trifecta, et pas juste par le product manager, même si ce dernier joue un grand rôle dans l’orchestration du travail de vision.
Ensuite, concernant les jalons, on considère chez BackMarket que les visions Trifecta sont un préalable à l’exercice d’OKRs de l’entreprise et à l’exercice budgétaire. Concrètement qu’est ce que ça veut dire?
En milieu d’année, chaque Trifecta travaille sur sa vision 18 mois. Puis pendant deux jours, une présentation de chaque vision a lieu devant les membres du comité exécutif. Un échange a lieu, des challenges sont soulevés, ce qui permet d’ajuster la vision.
C’est une approche “bottom-up” qui permet ensuite au comité exécutif de définir les OKRs de l’année suivante, en version “top down”.
S'ensuit l’exercice budgétaire pour l’année suivante. Il est fait en connaissance de cause, à partir de la vision des équipes, et des priorités de l’entreprise.
Les roadmaps se font à une cadence trimestrielle, on mesure le progrès par rapport à la North Star Metric définie dans la vision.
Savinien Lucbéreilh, Partoo
Tout d’abord, je dirais que la vision globale de l’entreprise et la vision produit représentent les objectifs alors que la stratégie produit, la roadmap et les OKRs sont les moyens pour les atteindre.
Dans l’ordre, la stratégie travaille sur la vision globale de l’entreprise et en parallèle, l’équipe produit bosse sur la vision produit. Ensuite, nous nous réunissons pour vérifier que nous sommes bien alignés. Si ce n’est pas le cas, nous en discutons jusqu’à tomber d’accord et être sur la même longueur d’onde. C’est un travail plutôt long mais nécessaire afin de travailler dans la même direction et inspirer.
Une fois ce travail effectué, l’équipe produit travaille sur la stratégie à mettre en place pour atteindre cette vision produit.
Enfin, l’équipe produit définit une roadmap et des OKRs en lien avec la stratégie afin de pouvoir atteindre nos objectifs.
Emile Karam, Garantme
Voilà comment nous avons défini les choses chez Garantme :
a. Vision Globale de l’entreprise
Définition : La vision, c'est le message inspirationnel que vous dégagez. C'est le monde idéal que la marque souhaite créer. La vision doit être audacieuse. Il faut créer une histoire que toute personne associée à votre marque pourrait facilement raconter.
b. Vision Produit
Définition : La “Vision Produit” décrit la destination ciblée par une équipe produit. Plus précisément, elle décrit comment un monde futur peut bénéficier du produit de l’entreprise.
c. OKRs
Définition : Les OKRs décrivent de manière inspirationnelle (L’objectif) et chiffrée (Le Key Result) comment l’entreprise (et non pas le client, on change de cible) bénéficierait de l’atteinte de la Vision Globale.
d. La stratégie produit et la roadmap
Définition : La Stratégie Produit est l’outil qui permet de sélectionner les problématiques à adresser par une équipe pour faire passer à l’action.
Je résumerai la suite comme ça :
La stratégie peut être formalisée en 3 étapes :
Décrire le “what?” (les problèmes à adresser, les cibles, les besoins et contraintes pour l’entreprise)
Décrire le why? (la data, les axes stratégiques, tout ce qui a mené à la priorisation de ces sujets)
Décrire le how? (l’organisation et le planning).
Christopher Parola, Yousign
Pour moi, l'ordre est le suivant :
a. Mission de l'entreprise
b. Vision Produit
c. Stratégie pour exécuter cette vision et mission : c'est là que les OKRs entrent en jeu, car pour nous les Objectifs d'une année définissent la stratégie d'une année : ils indiquent ce qu'on fera et ce qu'on ne fera pas.
Les KRs nous rapprochent de la roadmap, ils sont souvent définis soit au trimestre, soit au semestre, et de eux découlent une roadmap d'initiatives
3/ Quel processus suivre pour définir la vision produit ?
Rémi Guyot, Thiga
L'exercice le plus réussi de vision produit que j'ai mené était un mélange de prototype, de roman-photos et de commentaires du CEO en live. Sur le papier, ça a l'air bizarre. Mais le résultat était terriblement efficace pour expliquer, à travers les yeux de futurs clients, comment fonctionnerait notre produit demain et en quoi il apporterait de la valeur.
Ce projet a été réalisé par Emilie Ringwald et Dawid Woldu, et demeure un étalon en la matière à mes yeux. Il s'agit d'une vision à visée interne, donc je ne peux pas le partager. En gros, on suivait trois histoires d'utilisateurs fictifs, dans trois pays différents, qui souhaitaient aller quelque part, avec des motivations et des contraintes qui permettaient de mettre en valeur les vertus du produit à construire : un couple voulait voyager à moindre coût, l'autre atteindre un endroit très isolé, etc. Et la vision partagée montrait leurs expériences, alternant entre des situations complexes à résoudre et des interfaces futures qui y répondraient. Le résultat était très concret et très humain. Et, étrangement, beaucoup plus universel que certaines formules rédigées de manière ouverte pour guider sans prescrire.
Amandine Durr, Back Market
L’exercice de vision aboutit à un document écrit qui suit un template partagé par toutes les Trifectas. Le template est conçu pour faciliter la lecture mais le processus pour arriver à ce rendu final ne suit pas nécessairement le même ordre.
What’s the vision? - On donne le cadre d’emblée, on se positionne. Ça doit être clair, mémorable, user-centric.
What’s the North Star Metric, and the level of ambition? - un classique mais incontournable, on invite aussi à parler de safeguard KPIs.
How do you back this vision ? - un résumé des data points et insights qualitatifs que l’on a collectés et qui expliquent pourquoi on se choisit cette vision.
How does it help the brand? - est-ce que cette vision aide à la différenciation? correspond bien à la North Star Value de BackMarket?
What are the enablers of the vision? - il peut s’agir d’organisation d’équipe, de dépendances avec d’autres équipes, d’enablers tech, de besoins en data, et bien sûr des premières solutions qu’on a envie de tester.
What is the overall timeline? - une estimation “grandes mailles” des solutions à venir qui aide à préparer le budget. Il est bien clair que ces estimations peuvent évoluer donc il est recommandé d’ajouter un indice de confiance.
Appendix : designs low fi, user flows, data analysis, user research, business plan complet etc. Tout ce qui est à l’appui de la vision et doit être accessible pour ceux qui veulent aller plus loin, ou pour répondre aux questions. Mais ces éléments n’ont pas à être présentés dans le corps du document, qui doit rester concis.
Emile Karam, Garantme
Il existe plusieurs méthodes pour définir une “Vision Produit”, la meilleure méthode n’existe pas, mais la pire méthode, elle, existe : C’est de ne pas avoir de méthode. Le mieux est de franchir le pas de la page blanche en testant une méthode et ensuite de la garder ou de la changer lors de la prochaine itération.
Dans mon cas, j'ai utilisé les principes présentés dans le blog de Product Board comme boussole pour évaluer la qualité du livrable :
Orienté client
Ambitieuse, mais pas impossible
Différenciante
3 à 5 ans dans le futur
Les principes évoqués sont en cohérence avec la culture d’entreprise de Garantme, ce qui a facilité leur adoption et la mise en pratique qui suit.
Ensuite, j’ai opéré en deux temps, d’abord en comité restreint : CPO, CEO et Product Designer, puis avec les équipes via des ateliers de travail.
Le détail de cette démarche se trouve dans l’article de blog Building the Product Vision at Garantme.
Christopher Parola, Yousign
Le découpage que j'aime prendre est le suivant :
Mission : l'impact de l'entreprise sur le monde - devrait être valable pour plusieurs années
Vision : la matérialisation de cette vision - devrait être valable pour 5 ans
Stratégie : l'exécution de cette vision sur plusieurs années (1 à 3 ans, au delà c'est de la prospective)
Tactique : les premières marches qu'on va gravir sur les prochains mois.
Pour arriver à cette vision, il existe de nombreux outils top down, partant de la mission. Le problème avec cette approche, c'est qu'il est très difficile de les mettre en oeuvre dans une entreprise qui ne ressent pas le besoin d'avoir une vision produit et d'investir du temps, de l'énergie et de l'argent (par exemple pour lancer des campagnes de recherche utilisateur et alimenter cette vision).
Je vais décrire une approche très bottom-up, car c'est l'approche que j'ai utilisé que ce soit en étant PM ou CPO dans une entreprise qui n'avait pas définie de vision produit. L'idée de cette approche est de regarder ce qu'on fait à date, ce qu'on a envie de faire dans un futur proche, et d'essayer de remonter à une vision claire. Cette vision sera ensuite à partager au sein du management (Comité exécutif, de direction etc), et pourra être challengée. D'expérience, il est bien plus simple d'atterrir à une vision en challengeant un existant plutôt que de partir d'une feuille blanche.
Il est très rare que vous rejoigniez une entreprise qui n'a pas déjà une liste de courses (appelons ça backlog ou roadmap figée). On peut considérer que ces éléments constituent la tactique de votre entreprise, même si ça n'est pas aussi explicite. En les listant, vous allez pouvoir commencer à les regrouper sous de grandes catégories. Ces catégories peuvent devenir vos stratégies.
Et quand vous allez voir l'ensemble de vos stratégies, vous devriez pouvoir rédiger une vision qui regroupe ces stratégies : bravo vous avez le brouillon de votre vision produit, qu'il vous reste maintenant à présenter au top management pour la faire challenger.
Benoît Terpereau, Lunii
Il y a quelques mois je suis tombé sur cet article. Ce fut pour moi une révélation. C’est un des articles les mieux construits que j’ai lu depuis longtemps et surtout, il rend compréhensible ce concept de Vision qui est tellement abstrait. Il rend également clair le processus pour y arriver.
Le pitch ? Utiliser la méthode du Design Sprint pour créer une Vision Produit en 5 jours. Et ça marche !
J’ai pu expérimenter cette méthode chez OCUS et j’en ai fait un débrief ici.
Ce qui est canon avec cette approche c’est de mettre nos stakeholders habituels au centre de la conception de cette Vision. Aussi le concept de « Tangible Vision » souvent représenté par un storyboard qui décrit le futur rend la Vision tellement évidente et concrète qu’on arrive à emmener des équipes, des investisseurs, des futurs recrutements, etc.
4/ À quel moment faut-il formaliser la vision produit ?
Savinien Lucbéreilh, Partoo
D’un point de vue personnel, je pense que c’est un travail à effectuer dès la création de l’entreprise pour déterminer les contours du scope à attaquer.
Lorsque j’ai rejoint Partoo en 2018, nous avions pas mal de retard sur nos concurrents et la vision produit nous paraissait « évidente ». Nous ne passions pas beaucoup de temps dessus car nous n’en ressentions pas le besoin. Avec le recul, je pense que nous aurions dû y passer plus de temps !
La phase d’hypercroissance que nous connaissons depuis 2020 a changé la donne et je dirais que c’est à partir de ce moment-là que nous avons commencé à investir du temps sur la définition de cette vision. C’est une étape tellement importante, déterminante et nécessaire pour le futur de l’entreprise qu’elle nécessite d’être prise en compte au plus tôt.
Christopher Parola, Yousign
Dès que le fondateur qui portait cette vision produit ne peut plus intervenir sur 100% des projets. Dans la majorité des cas, la vision produit n'est pas rédigée mais existe à la création de l'entreprise. Celle-ci est ensuite portée par un des fondateurs, mais plus on multiplie les projets, plus l'impact du fondateur sur ces projets se réduit, et la vision finit par s'étioler et ne plus guider l'ensemble des projets.
5/ A quelle fréquence revoir la vision produit ?
Rémi Guyot, Thiga
Quand elle ne remplit plus son rôle d'alignement des équipes :
Soit parce que le produit réel incarne désormais ce qu'elle décrit,
Soit parce qu'elle n'est plus pertinente au vu d'un changement de contexte ou de conviction.
Quelques signes qu'il est nécessaire de revoir sa vision produit :
Plus personne n'y fait référence à part pendant l'accueil des nouveaux employés,
La roadmap annuelle ne contient aucun élément qui ressemble à des pas en direction de cette vision,
La vision n'aide pas à trancher quand les équipes font face à des dilemmes de stratégie, etc.
Christopher Parola, Yousign
De manière ritualisée une fois par an, mais également au fil de l'eau s'il est nécessaire d'y apporter une correction. Par exemple, chez Yousign, nous avons pour objectif de déployer notre solution partout en Europe.
Ainsi, notre vision produit est :
“We provide a highly secure contract management platform offering the best end-to-end agreement experience.”
Si demain nous décidons par exemple de réduire notre offre à la signature électronique, nous n'hésiterons pas à la changer pour remplacer Contract Management platform par Online Signature Platform.
Savinien Lucbéreilh, Partoo
Globalement, la vision de l’entreprise ainsi que la vision produit sont revues au moins 1 fois par an. Cette fréquence peut être plus élevée si l’entreprise décide de pivoter, qu’elle n’est pas inspirante, que les collaborateurs ne la trouvent pas claire ou tout simplement que l’on en ressent le besoin.
Étant donné que définir une vision produit nous prend plusieurs semaines, nous ne pouvons pas nous permettre de la remettre en question chaque trimestre comme nous le faisons pour la définition de la roadmap ou les OKRs.
6/ Quelles sont les erreurs (ou biais) à éviter ? Et les tips pour réussir ?
Benoît Terpereau, Lunii
Pour moi la plus grosse erreur c’est de considérer son travail sur la Vision comme terminé. Ce n’est jamais terminé, la Vision est un élément vivant qui va changer au gré des interviews utilisateurs, des erreurs que l’on commet, des pitchs investisseurs, etc. Il faut la challenger, la torturer, la bouger pour la rendre plus solide, éviter les biais et en faire un atout concurrentiel fort. Pour réussir il vous faut une approbation forte de votre CEO, sur le principe, le processus et le résultat. Si ce•tte CEO fait sien•ne votre Vision Produit c’est gagné !
Rémi Guyot, Thiga
L'approche classique consiste à trouver une phrase parfaite qui est censée résumer notre vision produit. Genre l'iPod d'Apple = 1000 songs in your pocket. Dans les faits, j'ai toujours trouvé ça impossible à atteindre. C'est peut-être parce que je manque de talent marketing, mais c'est terriblement difficile de trouver la formule qui va réellement servir d'outil d'alignement, de motivation et d'alimentation des équipes. Si vous galérez avec ce format, tentez quelque chose de plus tangible : un prototype détaillé du produit qu'on cherche à construire (tel qu'on l'imagine à cet instant), une histoire utilisateur complète, des fonctionnalités précises, un point de vue fort sur la proposition de valeur, etc.
Christopher Parola, Yousign
Créer une vision 100% inspirationnelle mais qui ne filtre pas ce qui va être réalisé. Par exemple chez Yousign, la vision explique ce que nous sommes (une plateforme de contractualisation) et quel est notre différenciant (l'expérience utilisateur). Cela donne du focus aux équipes.
Essayer de construire une vision parfaite et figée : c'est un objet vivant, il faut être à l'aise pour le faire évoluer.
Ne pas commencer à travailler la vision parce qu'on n'aurait pas l'appui du top management : mieux vaut proposer une vision à côté de la plaque que de ne pas travailler dessus.
7/ Partagez avec nous la vision produit de votre entreprise
Christopher Parola, Yousign
Vision : We provide a highly secure contract management platform offering the best end-to-end agreement experience.
Emile Karam, GarantMe
Vision GarantMe : Un monde où l'assurance inspire confiance et l'immobilier se vit avec sérénité
8/ Autres exemples de vision produit
Amazon - To be Earth's most customer-centric company, where customers can find and discover anything they might want to buy online.
Apple - To bringing the best user experience to its customers through its innovative hardware, software, and services.
Disney - To be one of the world's leading producers and providers of entertainment and information.
Google - To provide access to the world's information in one click.
Autres exemples (Dropbox, Airbnb, Asana…)
9/ Pour aller plus loin
Conseillés par Benoît Terpereau, Lunii :
Conseillés par Emile Karam, GarantMe :
La partie Product Vision de Empowered
La partie Product stratégie de Empowered
Product Strategy: The Missing Link" by Inspired Author Marty Cagan of SVPG at Lean Product Meetup
(EN) Roadmaps are dead! Long live roadmaps! (Bruce McCarthy, Founder @ ProductCulture)
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J’ai cofondé Stellar pour accompagner les dirigeants de startups à faire de leur Produit un moteur de croissance inarrêtable.
Et pour activer cette croissance, on a créé :
Un collectif de 15 CPO des meilleures boîtes tech (Zenly, Yousign, BlaBlaCar)
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Timothé